(Indonésie : Fin décembre 1982 à fin mars 1983)

blason-indonesieITINÉRAIRE :

Jakarta (Île de Java)

Bogor

Île Putri

Ujung Pandang (Îles Célèbes ou Sulawesi)

Kendari

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Tinobu

Air Panas

Île Kramat

Île Bokori

Denpasar (Île de Bali)

Tour de l’île de Bali

Traversée de l’île de Java :

masque-de-barong-traditionnel-bali-en-indon-sie-utilis-dans-danse-performance-banque-dimagesSurabaya

Yogyakarta

Borobudur

Prambanan

Surakarta

Bandung

Retour à Jakarta

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COMPTE RENDU DE MON VOYAGE EN INDONÉSIE:

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À l’âge de 19 ans, j’ai participé à un échange international avec JEUNESSE CANADA MONDE. Voici la description du programme venant de leur site internet : « Jeunes leaders en action est un programme unique de 6 mois destiné aux jeunes de 17 à 25 ans. Ce programme réciproque est divisé en 2 phases de 3 mois, un au Canada et l’autre à l’étranger, et les jeunes participent ensemble aux deux phases. Pendant ce programme, les jeunes volontaires contribuent à des projets de développement menés par la communauté axés sur la santé, l’environnement ou l’équité hommes-femmes, vivent dans des familles d’accueil et prennent part à des activités éducatives organisées par des jeunes. »

Après avoir passé les étapes de sélection, c’est avec joie et excitation que j’ai appris quelques semaines plus tard, que ma candidature avait été retenue pour l’Indonésie.

PREMIÈRE PARTIE DU PROGRAMME : LA SASKATCHEWAN

Le programme échange a commencé par trois semaines au Camp Rayner au Lac Diefenbaker en Saskatchewan. J’y ai fait la connaissance de tous les participants canadiens et indonésiens. Nous avons eu des rencontres préparatoires au voyage  et avons monté un spectacle culturel. Nous avons aussi visité Régina, la capitale.

Je suis ensuite partie pour North Battleford avec mon petit groupe composé de huit Canadiens et huit Indonésiens.

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J’ai habité chez Jim et Vivian Phelps, parents de trois beaux enfants: Freddy, Bonnie et Jay. J’étais jumelée avec Yayuk, jeune fille javanaise issue d’une famille riche dont le père était un des gardes du corps du président Suharto.

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63-1Au travail, ma « counterpart » était Ilza Mayuni, native de l’île de Sumatra. J’avais beaucoup d’affinités avec elle. Nous avons travaillé aux côtés d’infirmières, dentistes, nutritionnistes et travailleurs sociaux au BATTLEFORD’S INDIAN HEALTH CENTER. Nous avons accompagné les infirmières dans leur tournée des sept réserves indiennes environnantes (Sweetgrass, Thunder Child, Onion Lake, etc.) pour les seconder dans leurs ateliers d’éducation populaire. Nous avons aussi oeuvré dans quelques écoles primaires et au préscolaire. Ce fut très formateur pour Ilza et moi. Le personnel du Centre a été vraiment accueillant et sympathique avec nous tout au long de notre séjour.

64-1En dehors des heures de travail, notre groupe de seize participants se regroupait souvent. Nous avions régulièrement des réunions avec John Carty, notre agent de groupe canadien et Ahkiar Ibrahim, notre agent de groupe indonésien. Nous avions aussi comme mandat de monter un spectacle représentant nos cultures respectives pour notre communauté d’accueil. Ilza nous a montré trois danses indonésiennes (Indang, Sarendo et Joli-Joli). Nous avons monté un répertoire de chansons en indonésien, en anglais et en français. (Martin Gingras, seul autre francophone du groupe, a interprété avec moi la chanson « Dondaine La Ridaine ».) Cindy, Hari, Sanjiv, Michel et moi avons préparé un numéro de ballet jazz. Pamela, Tim, Martin, Robin, Rahman, Yayu, Eka et moi avons monté une danse carrée du Québec. J’ai préparé une pièce à la flûte traversière, accompagnée par un pianiste professionnel.  J’ai aussi accompagné quelques chants. Ce spectacle culturel de danse, chant et musique fut très apprécié du grand public.

9-1J’ai eu l’occasion de faire quelques petits voyages -en dehors du travail- durant mon séjour à North Battleford: Yayuk et moi avons passé une fin de semaine avec notre famille d’accueil à leur chalet de Jack-Fish Lake. Moi et mon groupe sommes allés visiter un autre groupe de JCM à Rosetown. Nous avons aussi visité Saskatoon et y avons rencontré d’autres groupes de JCM. C’était toujours très agréable et stimulant de revoir les autres participants tout en découvrant de nouveaux lieux.

Je garde un beau souvenir de ces trois mois de vie de groupe intensive en Saskatchewan. Canadiens et Indonésiens, nous apprenions à nous connaître à travers nos cultures diamétralement opposées. J’ai approfondi mon anglais (par la force des choses), étudié le « bahasa indonesia » et découvert un tas de choses : les principes de l’islam, la culture, la mentalité, les traditions indonésiennes, etc.

DEUXIÈME PARTIE DU PROGRAMME : L’INDONÉSIE

65-1Après notre semaine d’évaluation à Régina, nous sommes monté à bord du « sky train », nous avons traversé l’Alberta et les Rocheuses pour nous rendre à Vancouver où nous avons passé trois jours, installés dans une auberge de jeunesse. Nous étions nombreux (64 participants) car les trois autres groupes de la Saskatchewan y étaient aussi. Nous avons eu des « meetings » mais avons aussi pu visiter la belle ville de Vancouver et son China Town ainsi que l’île Victoria.

Le grand départ pour l’Indonésie est ensuite arrivé. Nous avons pris l’autobus jusqu’à Seattle, dans l’état de Washington. Nous avons pris place à bord d’un Boeing 747 en direction de Narita au Japon. Le vol transpacifique a duré 9 heures et 50 minutes. Je me souviens avoir fait tant de social que je n’ai presque pas dormi. Notre deuxième vol, d’une durée de sept heures, nous a emmenés à Bangkok, en Thaïlande. Nous y avons passé une courte nuit de cinq heures dans un bel hôtel avant de retourner à l’aéroport. Troisième vol : direction Singapour : trois heures de vol. Et finalement, notre quatrième vol nous a emmenés à notre destination finale : Jakarta (vol de 1 heure 30 minutes).

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Je suis arrivée épuisée de fatigue à l’auberge de jeunesse et quand je me suis couchée, je suis rentrée en transe pendant une couple de minutes ; j’étais complètement paralysée. Je ne pouvais bouger aucun membre et aucun son n’est sorti de ma bouche quand j’ai voulu prévenir ma copine de chambre de mon état. Mon esprit s’est comme détaché de mon corps et je me voyais de haut, allongée sur le lit. C’était paniquant ! Quand je suis revenue à moi, je me suis sentie vraiment soulagée. Quelle expérience transcendante hors du commun.

Les quatre groupes de JCM ont passé trois jours à Jakarta. Nous avons fêté Noël, assisté à quelques réunions et visité : la capitale avec sa mosquée réputée pour être la plus grande de toute l’Asie du sud-est,  Miniature Indonesia (immense parc avec habitations traditionnelles représentant les différentes provinces de l’Indonésie), « Kebun Raya » à Bogor (jardins glorieux) et l’île Putri.

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Yayuk m’a emmenée chez elle ainsi que Dadang H. Djajadiningrat, mon amoureux indonésien. Je me sentais privilégiée de voir leur quartier respectif et de pouvoir faire connaissance avec les membres de la famille de chacun. De plus, ma bonne copine Sherley m’a emmenée à la maison de son homologue Rita et Yana nous a emmenés voir la résidence luxueuse de sa tante.

Après ces trois jours bien remplis à Jakarta, les quatre groupes se sont séparés pour aller rejoindre leurs communautés d’accueil. Mon groupe a pris l’avion de Java jusqu’aux îles Célèbes (Sulawesi). Yayuk et moi avons été accueillies chez une famille bien nantie, à Kendari. Le père de famille, Pak Koesnun Siddieq, était banquier. Le charmant couple avait quatre beaux enfants: Andy, Meriam, Tri et Nurul. Je me souviens que les quelques jours passés chez cette famille ont été fort agréables. Nous avons acheté des légumes à un petit marché de rue, couru après la poule dans la cour pour en faire notre souper, mangé d’excellents mets traditionnels indonésiens à la maison et au restaurant.

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21-1Nous sommes ensuite partis pour Lembo, notre petite communauté d’accueil isolée, sans eau courante, sans électricité et sans moyen de transport à part une bicyclette pour tout le village. Nous y avons passé deux mois et demie. J’étais logée chez un charmant couple (Ayah Mordini, 41 ans et mama Welipau, 38 ans), parents de quatre enfants (Walija, 12 ans, Nilawati, 10 ans et Wanisa, 8 ans et Rahim, 2 ans) avec ma nouvelle « counterpart » Eka.

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24-1Nous avions une chambre avec pour seul ameublement, un lit double avec filet pour nous protéger des insectes. La petite famille couchait par terre dans les deux autres chambres sur de minces tapis tressés en feuilles de palmier. À l’heure des repas, Eka et moi étions assis à la table avec le père de famille et avions droit à une fourchette pour manger car nous étions les invitées. La mère de famille et les enfants mangeaient avec leur main droite, assis par terre devant le petit feu de bois servant à cuisiner, dans une petite pièce au fond de la maison.

23-1Dans la cour, il y avait un puit et une petite bécosse. Nous utilisions l’eau du puit pour nous laver -avec notre main gauche, comme le veut la coutume – après avoir fait nos besoins. Comme nous n’avions pas de douche, nous allions à la rivière pour nous laver et laver notre linge. Nous devions garder notre sarong en tout temps ; le port du costume de bain aurait dérangé nos hôtes musulmans.

Pendant toute la durée de notre séjour à Lembo, le menu est resté invariablement le même, trois fois par jour : poisson frit, riz et « kopi » (café) très sucré. « Ayah », le père de notre famille d’accueil, mangeait aussi une préparation gélatineuse transparente dont je n’ai jamais réussi à apprécier le goût et la texture. Je me souviens d’un jour de fête au village ; on nous a servi du poulet. Wow ! Quelle joie de varier notre menu ! Je me souviens aussi des petits pains que notre « ibu » (mère de famille) préparait spécialement pour nous. Nous les mangions avec goût et reconnaissance ! Nous avons aussi beaucoup apprécié les mangues, tendres et juteuses, que les villageois nous invitaient à venir déguster avec eux à toutes heures du jour.

Ilza et moi avons donné des cours de danse indonésienne à l’école primaire et des cours d’anglais à l’école secondaire du village.

Nous avons aussi participé à des corvées telles que couper le gazon de la mosquée à la machette, faire un terrain de volleyball et construire une rue avec les hommes du village.

Une fois par semaine, nous marchions deux kilomètres pour nous rendre à l’unique marché des environs et aidions à rapporter le poisson, le riz, la farine, le sucre, etc.

Les villageois se réunissaient une à deux fois par semaine au « balai desa » (lieu de rencontre constitué d’une scène recouverte d’un toit en feuilles de palmier) pour danser au son de musique traditionnelle jouée sur des percussions. Ils nous ont enseigné les mouvements de danse, répétitifs et plutôt primitifs mais, nous prenions plaisir à nous joindre à eux pour cette   amicale danse en cercle.

30-1Nous sommes sortis du village une journée pour aller nous baigner à la mer. Plusieurs villageois nous ont accompagnés. Pour nous y rendre, nous avons dû marcher 14 kilomètres aller-retour sous un soleil de plomb. Nous étions heureux comme des poissons dans l’eau malgré l’inconfort du port du sarong pour nous baigner. Les villageois sont restés à l’ombre d’un petit abri à nous regarder et à souffrir de la chaleur. Ils fuient le soleil car pour eux, avoir une peau foncée est synonyme de pauvreté et à l’inverse, avoir une peau claire est synonyme de richesse. Ils portent souvent des manches longues et se mettent de la crème blanche dans le visage. Leurs critères de beauté sont définitivement très différents des nôtres ! Je me suis fait flatter le poil des bras; étonnamment, les Indonésiens trouvent ça beau ! Eux n’en ont pas !

J’ai amélioré considérablement mon habileté à parler le « bahasa indonesia ». Les Indonésiens étaient agréablement surpris de mes connaissances de leur langue et fiers que je m’y intéresse. Pour moi, c’était une belle porte d’entrée pour rentrer en communication et tisser des liens avec eux.

Nous avons fait quelques sorties de groupe. Nous sommes allés à Tinobu pendant trois jours. Nous étions hébergés dans des familles. Nous étions l’attraction du village ; il y avait toujours une foule autour de nous, même dans les maisons!

Nous avons fait deux expéditions en bateau : une à  l’île Kramat et l’autre à Air Panas où nous avons vu d’étonnantes sources chaudes. Et finalement, nous avons passé trois jours à l’île Bokari, village pêcheur avec maisons sur pilotis.

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À la fin de notre séjour à Lembo, les adieux ont été déchirants ; je savais que je ne reverrais probablement jamais ma famille d’accueil et tous les sympathiques villageois. Contrairement à d’autres participants, je serais restée volontiers plus longtemps ; je m’y plaisais vraiment.

Nous sommes partis pour Kendari où nous avons eu quatre jours de rencontres d’évaluation avec les trois autres groupes de JCM. Nous avions tant de choses à nous conter ! Nous avons ensuite pris l’avion jusqu’à Ujung Pandang. Nous avons visité les maisons torajas sur pilotis et aux toits en forme de cornes de buffle.

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Nous avons pris un autre avion jusqu’à Bali, cette magnifique petite île aux 10 000 temples bouddhistes. Nous étions tous les participants de JCM ensembles. Nous avons fait le tour de l’île en autobus et vu des plages, des temples, de magnifiques rizières en escaliers, un spectacle de danse traditionnelle avec son « gamelan » (orchestre à percussions), etc.

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Gede, un autre bon ami indonésien, natif de Bali, m’a invité à aller visiter sa maison avec les Indonésiens de son groupe. J’étais la seule invitée blanche ! Je me sentais vraiment privilégiée et presque Indonésienne !

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Nous avons ensuite traversé l’île de Java en autobus et visité le plus grand site bouddhiste au monde, Borobudur et le site hindou de Prambanan avec ses 240 temples shivaïtes. Nous avons passé quelques jours à Yogyakarta avant de revenir à notre point de départ : Jakarta. Ces deux semaines de tourisme ont été fort agréables et ont bien fini notre   programme d’échange.

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Au moment du grand départ pour le Canada, les adieux entre les participants canadiens et indonésiens ont été déchirants. Nous avions vécu une expérience de groupe si forte et marquante tous ensemble !

Nous sommes revenus au Canada en passant par Singapour, la Thaïlande et Seattle aux États-Unis. Nous avons eu trois jours de rencontres à Vancouver pour faire un retour sur le programme et nous préparer au choc du retour. Après de nouveaux adieux déchirants, les participants canadiens se sont séparés et chacun s’est envolé vers sa province de résidence. J’ai fait un arrêt en Saskatchewan pour retourner voir ma famille d’accueil et les employés du Battleford’s Indian Health Center. Ce fut de belles retrouvailles.

À mon arrivée à l’aéroport de Québec, chapeau conique indonésien sur la tête, j’ai été accueillie avec excitation par ma famille. J’étais très heureuse de revoir tout le monde après mon absence prolongée. Les mois qui ont suivi ont été une longue période d’adaptation. L’encadrement offert par JCM n’étant plus, je devais reprendre ma vie en mains. La vie de groupe me manquait et mes amis des six derniers mois aussi. Ce voyage à l’autre bout de la planète a été le plus marquant de ma vie. Cette expérience extraordinaire a ouvert mon cœur sur le monde et les beaux souvenirs que j’en garde ne m’ont jamais quittée.

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